
Briser le silence
La mission de 'Briser le silence' est d'éduquer et de sensibiliser le public sur les sujets complexes liés à la violence sexuelle, au consentement, et aux dynamiques de pouvoir entre les individus.
En déconstruisant les mythes nuisibles et en donnant la parole aux femmes et aux victimes, le balado vise à aborder des sujets percutants d’une manière ouverte et divertissante.
Brisons le silence à travers ce processus d’accompagnement et de guérison de la société!
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Briser le silence
Épisode #4 - Pourquoi la princesse est toujours sauvée par un prince?
Dans cet épisode, Juliette reçoit Marie-Ève Brunet, anciennement intervenante chez Viol-Secours et étudiante au doctorat en sociologie, afin de discuter de différents concepts sociologiques en lien avec les violences sexuelles. À travers des exemples tirés de livres, de films et de séries, elles abordent des sujets comme la culture du viol, les rôles de genre et les dynamiques de pouvoir entre les individus. Bonne écoute!
Marie-Ève Brunet a complété un baccalauréat en criminologie et elle étudie présentement au doctorat en sociologie. Ses principaux intérêts de recherche et de travail sont les processus de victimisation sexuelle et la place que l'on fait aux savoirs expérientiels tant en intervention qu'en recherche.
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Bonjour, bienvenue au quatrième épisode du balado Briser le silence. Je m'appelle Juliette Marcoux et je suis votre animatrice aujourd'hui, je suis accompagnée de Marie-Ève. Puis, on va pouvoir parler ensemble des concepts sociologiques. J'espère que vous allez aimer. Bonne écoute. Notre balado aborde les violences sexuelles et leurs conséquences. Il peut aussi être question de traumatismes, de violences, de suicide, de consommation, d'auto-mutilation et autres. Cet épisode s'adresse à un public averti. Bienvenue à Briser le silence. Votre balado traitant des violences sexuelles, de consentement et des dynamiques de pouvoir entre les individus. Votre animatrice Juliette Marcoux, ainsi que ses invités, échangeront sur ces réalités qui concernent l'ensemble de la population. Merci d'être à l'écoute. Ensemble, brisons le silence. Bonjour, je m'appelle Juliette Marcoux, et je suis votre animatrice aujourd'hui pour le podcast Briser le silence. Je suis en compagnie de Marie-Ève Brunet. Bienvenue. Merci, bonjour. Bonjour. Aujourd'hui, on a quand même un épisode assez intéressant et chargé en définition, en notions, en plein de trucs qu'on veut discuter. Je pense qu'on pourrait te laisser le temps avant de te présenter pour qu'on puisse savoir un petit peu et bien tu es qui. D'où je viens et pourquoi je suis là aujourd'hui? Oui, effectivement. Tout à fait. Donc Marie-Ève, justement, j'ai été intervenante à Viol-Secours pour près de sept ans. J'ai quitté, ça fait quelque temps maintenant, je travaille plutôt en dépendance, en développement de projets, de formation pour les professionnels qui travaillent dans ce milieu-là. Pourquoi moi aujourd'hui? J'ai fait un baccalauréat en criminologie, mais j'ai rapidement fait un changement de parcours, une réorientation en sociologie. C'est d'ailleurs la maîtrise en socio que le féminisme est apparu aussi un peu organiquement en me posant des questions, en me rendant compte de que ce que je vivais dans le quotidien, ça m'impactait. Les concepts sociologiques qu'on va aborder un peu plus tard, c'étaient comme des clés qui me permettaient de comprendre cette réalité-là, ce qui fait que je me suis de plus en plus intéressée, justement, au milieu féministe, jusqu'à devenir militante quand même assez activement dans les dernières années dans la ville de Québec. J'ai continué au doctorat en sociologie maintenant où est-ce que je m'intéresse justement au processus de victimisation sexuelle. Sur comment toutes les conceptions sociales, sur les violences sexuelles, les victimes, à qui on donne le statut de victime, à qui on le refuse, pourquoi, de quelles façons? Comment ça se confrontent aussi les conceptions, par exemple, plus légales des violences sexuelles ou comme du symbole un peu de la victime, versus les conceptions plus sociales militantes, par exemple, ou médicales, quand on parle de trauma, notamment. Tout ce côté côté plus pathologique autour de cette conception-là, puis comment ça se croise, comment ça rentre en tension. Puis de là, découle le tout plein de réflexions que nous aurons bientôt. Comme on l'a dit il y a quelques secondes, aujourd'hui, on va regarder des concepts sociologiques. Je pense qu'il y a beaucoup de mots, de termes qui ont tranquillement fait leur apparition ou qui sont de plus en plus populaires, utilisés. Puis ça vient confronter certaines personnes, en mêler d'autres, je pense. Il y a comme une incompréhension. Aujourd'hui, on est ici pour jaser de tout ça, essayer de rendre ça accessible. Plus clair, en tout cas. C'est ça. Parce que je comprends que ça peut être mêlant, puis que pour certaines personnes,
il y a toujours:« Ça, ça ne m'intéresse pas », mais au final, ça gagne à être connu, à être compris, je crois. Tout à fait. Un des gros enjeux en socio, en général, c'est tout le temps ça, c'est qu'on ne s'attache pas à l'individu. On ne s'attache pas à l'individu, on regarde plutôt les systèmes, les interactions entre ces gens-là. Quand on parle de concept sociologique, le plus gros que je pourrais définir déjà en entrée de juge, celui de la culture du viol, évidemment, c'est un incontournable, on a tendance à le réfléchir en termes d'individu, puis de responsabilités individuelles, puis c'est là souvent que vient le sentiment de confrontation, la confusion, puis le mélange de cartes, des discours et des débats qui n'ont aucun bon sens, finalement. Exactement. Exactement. Tu as nommé culture du viol? Un incontournable. Oui, je pense que... Qu'on entend beaucoup parler, qui est arrivé dans les espaces publics au Québec après la vague #MeToo en 2017, donc quand même. On entend un petit peu moins, mais toujours bien présent dans les milieux militants, notamment, et surtout souvent très repris dans les discours à contre courant. Oui. On pourrait dire ainsi, mettons. C'est quoi la culture du viol? Est-ce que tu veux te lancer, Juliette? Écoute, c'est tellement une grosse définition, c'est tellement vaste. J'ai envie de te dire, culture du viol, c'est la banalisation des violences à caractère sexuel de plusieurs façons, je dirais. Puis, tu l'as nommé, souvent, quand on parle de culture du viol, ça vient directement attaquer les gens parce qu'ils disent: « Moi, je n'encourage pas ça, les agressions sexuelles, le viol », mais ce n'est pas ça du tout. C'est qu'en tant que société, on a comme commencé à fonctionner, puis à se dire: « Ça, c'est normal, puis on va l'encourager », sans se poser plus de questions. On y va comme ça. C'est un peu par en dessous. Oui, oui. Très diffus. Exact, mais c'est là, puis ça vient justement jouer sur qu'est-ce qui est la perception des agressions sexuelles au niveau des victimes aussi, quand elles dénoncent, quand elles en parlent, quoi que ce soit. C'est tellement imbriqué dans notre société. Puis en tant qu'individu, je ne suis pas parfaite non plus. J'ai été élevée dans une société où il y avait la culture du viol. Ça vient nous imprégner, puis ça vient imprégner nos réflexions. Absolument. Je trouve que c'est nommé pas mal. Les gros éléments essentiels, en effet. J'ai envie d'ajouter ce que ce n'est pas la culture du viol. On l'a nommé en fait depuis le début, ce n'est pas une attaque individuelle de responsabilités contre des personnes qui seraient, eux, porteurs uniques de cette culture du viol par leurs gestes en action. Ce n'est pas ça du tout. On entend souvent aussi par, notamment, des dans certains discours politiques, dans certains lieux publics, certains humoristes aussi, c'était l'idée qu'on encourage les agressions sexuelles, puis avec tout le temps l'idée, franchement, le monde, ils ne font pas ça, encourager les agressions sexuelles, il n'y a pas
personne qui va dire:« Oui, viol la ». Exact. Heureusement, cela dit, it<i>happens,</i> ça arrive, il y en a. Mais c'est important, en effet, de maintenir cette croyance-là, que le monde est bienveillant, une de ces trois fameuses croyances fondamentales. Mais ce serait faux, comme j'ai dit, de croire qu'il n'y a pas de lieu ou d'espace où est-ce que ce discours-là a sa place. Je pourrais en reparler un peu si on veut y revenir. Mais quand on est dans l'encouragement direct aussi, on n'est plus exactement dans une culture du viol, mais plus dans l'initiation, l'incitation plutôt à commettre des gestes de violences. Quand on parle de culture du viol, je vais faire un petit arrêt sur ce terme-là, une culture, qu'est-ce qu'on entend par là? C'est quelque chose qui est plus ou moins stable dans le temps. C'est maintenu en vie, oui, par les individus, dans nos interactions, un peu comme tu le mentionnais, on le porte un peu tout en nous, mais ça circule surtout entre nous et dans nos différents espaces. Ça, je pense, c'est aussi mis en circulation par des institutions, de plus ou moins grande forme, on peut penser à l'école, assurément. L'art, entre autres, un grand véhicule de code culturel et tout. Mais, comme je dis, ça dépasse largement l'individu. Ça va précéder l'individu, ça va le dépasser. C'est quelque chose qui va être mobile, mais comme lentement, plus lentement. Souvent, il y a des changements qui se font dans le temps et heureusement, on n'est pas dans le même contexte que nous étions à l'époque de nos grands-parents. Exact, on peut au moins se compter chanceux pour ça. Tout à fait. Puis, on va parler de publicité un peu tantôt. Oui. La publicité des années 60, vous voulez des exemples incroyables. C'était...... magnifique. Des comparaisons de femmes et d'aspirateurs, notamment un peu... C'était du génie. Un certain génie. Un certain génie, définitivement. Mais bref, une culture, donc ça va regrouper un ensemble de croyances, de normes, de valeurs, d'attitudes, assurément. Puis, quand on parle de culture du viol, tu l'as nommé, ça va être un ensemble, tout cet ensemble-là qui va participer à banaliser, à normaliser, puis oui, parfois, encourager quand même une forme ou une autre de violences sexuelles. On peut penser, par exemple, ce qu'on entend des fois en salle de cours, pour avoir fait des accompagnements dans les salles, dans les tribunaux, oui. Quand on parle de relations sexuelles non-consentantes, par exemple, plutôt que de nommer agression sexuelle, il n'y a rien de relationnel à une agression, donc ça ne peut pas être non consenti, une agression. Quand on parle de... On l'a entendu beaucoup aussi d'erreur de parcours. Oui, aussi par rapport à l'agresseur, c'est une erreur de parcours. Je ne sais pas trop une drôle d'erreur quand même. Pas pire erreur, je dirais. Pas pire erreur, oui, tout à fait. Quand on parle aussi, j'ai vu dernièrement une expérience sexuelle ou une aventure sexuelle aussi d'ailleurs. C'est intéressant. C'est spécial, quand même. Quand même. Quand on va taguer une situation de violences sexuelles comme étant un regret par la suite. Donc, tout ce genre de termes-là qui va justement amener l'idée que ça fait partie d'une vie un peu normale, ça fait partie...... du cheminement. C'est ça. On les côtoie et c'est là, puis tant pis, ce n'est pas si grave. Justement, cet ensemble-là, d'attitudes de croyances et tout, va contribuer à instaurer une espèce de climat social qui va je vais redire instaurer, faute de verbe autre, qui va créer une certaine tolérance ou une espèce de seuil de tolérance qui va amener à hiérarchiser, puis comparer des formes de violences sexuelles à d'autres.
Où est-ce qu'on va toujours être dans là:« Là, ce que tu as vécu, ce n'est pas si pire que ça quand même, remets-toi en.» J'ai une situation en tête où justement, quelqu'un en situation d'autorité sur une jeune, je travaillais en jeunesse avec les ados, qui lui disait deux, trois jours
après l'agression:« À un moment donné, il va falloir que tu t'en remettes. » Mais ce n'est pas si simple non plus. On va y aller avec des hiérarchisations, mais ça va aussi créer des clichés, des stéréotypes. Ça va perpétuer certains mythes. Beaucoup aussi au niveau de ce qui serait finalement des vraies victimes, des vrais agresseurs, puis des vraies formes de violences sexuelles, des vrais viols. J'aime bien le mot agression complète. On entend ça souvent. Une vraie agression. Il y a ce terme-là que j'entends au téléphone. Il y a des femmes qui nous appellent puis qui me disent: « Ce n'était pas une agression complète », puis c'est la première chose que je reprends au téléphone.
Je dis:« C'est une agression sexuelle, il n'y a pas de complet, de pas complet. Ce que tu as vécu, c'est une forme de violence. On est là, il n'y a pas de moins grave ou de plus grave. » Mais c'est très fréquent quand même de l'entendre. Oui, puis ça vient semer un doute sur l'expérience de la victime, parce qu'elle
se dit:« Là, dans le fond, ce n'est peut-être justement pas grave. Je n'ai peut-être pas la légitimité de mobiliser des services ou de mobiliser mon réseau social, mon soutien, pour aller débriefer ça ou comprendre ou intégrer ce qui s'est passé, peut-être que le sentiment de malaise, dans le fond, il est... J'overreact.»Exact. Ça vient créer ce doute-là, puis c'est ça qui est un des gros impacts de la culture du viol par rapport directement au violences sexuelles, puis ça va au-delà de ça, mais c'est ce doute-là, cette incapacité-là, des fois cette confusion-là à reconnaître un statut de victime, d'expérience victimaire ou non. On va le voir, c'est porté par tous et toutes, donc on fait tout un peu partie de ce problème-là. Après, qu'est-ce qu'on en fait? Puis de quelles façons ça se dessine aussi? Exact. D'ailleurs, petit retour en arrière quand même, je trouve ça important de le mentionner parce que c'est trop peu souvent abordé, mais ce concept-là, quanad on parle de culture du viol alors que le mot viol, on ne l'utilise plus tellement. Non. Justement parce qu'il est dans l'idée que ce serait la seule forme complète d'agression. Pourquoi culture du viol reste encore dans notre discours aujourd'hui plutôt que culture de violences sexuelles, de tolérance aux violences sexuelles ou peu importe? Et bien c'est que c'est un concept qui nous provient quand même des années 70. Donc ça commence à faire un petit moment que c'est un concept qui est étudié, puis qui est documenté empiriquement par ailleurs. Puis ça, c'est tout le temps important, la culture du viol n'est pas de l'ordre de la croyance, elle est démontrée. C'est une réalité qui existe dans nos sociétés occidentales et au-delà des sociétés occidentales par ailleurs, mais c'est surtout documenté dans nos sociétés occidentales. Ça nous provient donc des milieux afroféministes américains, ce qui est très intéressant. Quand ils se sont rendus compte que toutes les sœurs, c'est des femmes essentiellement, des personnes qui s'identifiaient comme femmes à l'époque, dans leur intimité, vivaient des formes ou d'autres de violences, notamment conjugales, mais tout le temps des pressions à sexualiser ou à devoir être sexuelles constamment, puis des formes de violences sexuelles sur le large spectre de ces violences-là. C'est en discutant entre elles qu'elles ont fait: « Voyons, ce n'est pas normal de vivre ça. » Puis qu'on le voit autantC'est ça, exact. Que ce soit quelque chose qui soit finalement commun comme expérience. C'est en discutant, puis là, elles ont commencé à documenter ce truc-là. Ça nous provient quand même des années 70, mais ça a pris un temps énorme avant de passer des milieux militants au milieu de la recherche, donc ça a été repris par les universitaires surtout, puis finalement, coulé dans les espaces publics. Comme je le mentionnais, au Québec, c'est en 2017 qu'on a commencé à en entendre parler. Puis, même dans les milieux féministes comme tels, ce n'était pas un concept qui était très investi avant ces années-là, alors que dans les dernières années, on l'entend, il y a eu énormément de publications, énormément de bouquins super excellents d'ailleurs sur le sujet. On a l'impression que c'est récent, mais ce ne l'est absolument pas. Et c'est documenté depuis fort longtemps. J'aime ça le ramener parce que justement, des fois, ça vient déboulonner certains arguments de certaines personnes qui portent des contre courants, mettons, à cette idée. Je ne le savais pas, en fait. Oui, puis c'est important de mentionner des milieux afroféministes, surtout, ça a été porté par le Black<i> feminism</i> aux États-Unis, c'est quelque chose qui doit être reconnu et entendu par ailleurs et nommé. Parce que quand on parle d'intersectionnalité, c'est une réalité qui est encore d'autant plus embêtante pour des personnes racisées, notamment. Je l'ai dit tantôt, la culture du viol, c'est un concept qui ne s'attache pas à l'individu, mais qui s'attache à la société, au système. Mais en tant qu'individu, on a tout un rôle à jouer. Une des façons, justement, de prendre ce rôle-là, c'est de prendre du recul, puis de se questionner sur comment on a été amené à réfléchir, c'est quoi un homme? C'est quoi une femme? C'est quoi les rôles qui sont associés à ça? Quand on parle de socialisation genrée, on est là-dedans. On a tous appris à vivre selon les codes. Oui. Qui nous ont été... qui sont alliés en fait avec notre assignation de genre qu'on a eue à la naissance. Il y a même avant ça d'ailleurs. Cette socialisation genrée commence avant même la naissance. Les fameux...<i>Gender reveal.</i> Gender reveal, notamment. Puis tous ces clichés-là, évidemment, et bien ça forme des stéréotypes, des clichés de genre qui sont associés à un rôle qui serait naturellement désigné pour les femmes, désigné pour les hommes et c'est quelque chose qui est réfléchi de façon très binaire par ailleurs. Il n'y a pas de rôle vraiment associé aux autres genres parce que les sociétés ont été réfléchies de façon absolument... Les sociétés blanches occidentales ont été réfléchies de façon absolument binaire et c'est encore aujourd'hui les deux référents de genre dans la société. Oui, il n'y a pas... Non, c'est ça. Pas vraiment de modèle. Ça commence à être réfléchi, mais... C'est tranquillement. Tranquillement. Un exemple que j'aime bien prendre aussi quand on parle... Ça a des impacts, comme je l'ai dit, oui, des stéréotypes de genre par rapport aux femmes, puis quand on parle de violences sexuelles, évidemment qu'on réfère à une réalité qui est essentiellement féminine, bien qu'il y ait des victimes d'autres genres, évidemment. Mais il y a aussi des stéréotypes attachés aux hommes qui participent à la culture du viol. Un de mes exemples que j'aime bien reprendre, on peut penser à peu près à tous les films, mettons, de super-héros, tous les films où est-ce que... Les films d'action ou d'aventure, on peut penser à je ne sais pas moi, James Bond, Indiana Jones... Je ne suis pas très films d'aventure, fait que mes références sont un petit peu loin, mais il y en a sûrement des plus récents qu'on pourrait nommer. Je pense que c'est quand même des bonnes références, mais malheureusement, je ne suis pas mieux que toi. Toi non plus (rires)? Non c'est ça, ce n'est pas, c'est moins mon monde. Mais, où est-ce que, généralement, un des exemples que j'ai en tête, Batman versus Catwoman mettons. On l'a en images, on l'a en tête. On voit Batman bien bâti, bien costaud, avec un kit qui moule l'ensemble de ses muscles. Ça doit être incroyablement confortable. Puis de l'autre Catwoman qui est très svelte, une démarche tout le temps très sexy. Elle est incroyablement sexualisée. Ce qui est intéressant là-dedans, c'est qu'on voit bien, c'est quoi ces fameux deux types typiques-là: l'homme viril, puissant, qui est musclé, performant aussi. Il est là pour sauver le monde, il est très focusé sur la tâche. Un sauveur. Un sauveur, exact. Puis qui est très directif aussi, très là, très efficace. Oui, on ne questionne pas non plus ses décisions, il va puis... Non, exact. Puis c'est très défini, musculairement, là, on parle d'hypertrophie un peu insensé. On dirait presque comme 14 abdos plutôt que 6. Oui, ça ne fonctionne pas. Il y a quelque chose là d'un petit peu trop intense. Puis de l'autre côté, on a Catwoman qui, elle, est beaucoup plus frivole, très légère, une petite démarche bien déhanchée, beaucoup dans le décalage, elle fait beaucoup d'avances tout le temps, elle est beaucoup dans l'érotisation des situations, elle va vraiment jouer là-dessus. Mais surtout, et c'est là que c'est intéressant, c'est le rapport à l'action dans les deux. D'un côté, on a Batman qui va produire les situations, il va aller de l'avant tout le temps et Catwoman qui, elle, va toujours avoir plus un rôle de soutien, elle va toujours être à l'arrière, elle va toujours être pas très loin, mais derrière. Elle ne leadera pas. C'est probablement le point le plus important dans l'association de genre. Il y aurait probablement d'autres exemples qui sont encore plus éloquents pour ça. C'est que d'un côté, on a les hommes, donc virils, puissants, performants, actifs. Ils sont les héros de la situation. Ils sont les héros de notre société, ces hommes. Puis de l'autre, on a les femmes qui, elles, sont là pour être douces, caring,<i> cute,</i> sexy. Sexy. Pas tout le temps quand même, mais sexy parfois. Puis, en soutien. Un petit peu plus loin. Elles suivent. Oui pas dans l'initiative, donc beaucoup dans un rôle de passivité. Oui, exact. Puis ça, c'est.... quand on y pense, on a donc quelqu'un de super actif, l'autre super passif et c'est là un des gros enjeux, puis c'est là où est-ce que souvent, quand je donne des conférences, justement, dans les universités et dans les cégep, à propos de cette conception-là, que viennent les grosses discussions, c'est de quelles façons ça impacte la commission de violences sexuelles? C'est que justement, on a des agresseurs qui sont donc, dans notre imaginaire collectif, des monstres massifs et qui vont causer des situations et qui vont être activement dans l'idée de domination puis de violences et des victimes. Passives. Passives, pures, sans faute. Fait que quand on est une vraie victime, on correspond à ce rôle passif. On n'est pas une vraie<i>victime</i> si on a commis une faute, si on a été réactive ou si on a été plus agressive dans la réponse à l'agression. Puis de l'autre côté, si on se fait agresser par un homme qui est plus svelte, plus petit, qui a l'air tout timide ou qui est quelqu'un qu'on connaît, qui ne représente pas une menace dans une ruelle. Et bien là, ça ne peut comme pas. C'est ça, ce n'est pas possible, franchement. Non, ça n'arrive pas, ça. Et puis là, on se retrouve avec justement des discussions collectives sur le fait que ce n'est peut-être pas vraiment ça, dans le fond, comme il y a pire que ça, où justement, là, on va comparer les situations. Et c'est de là que va provenir essentiellement cette idée de banalisation, parce que nos référents collectifs, c'est cette idée-là du monstre dans la ruelle qui attaque la pauvre petite princesse. Puis ça, et bien c'est partout. Puis moi, un truc que j'aime aussi... Je te sens super emballée. J'allais dire, on a le même âge, mais vraiment pas. Non, je suis beaucoup trop vieille. Mais tsé moi, j'ai grandi avec Super Mario. Oui. Je connais la référence. J'espère. Je veux dire on n'est pas...(rires). Ça va, puis tsé, Super Mario là, on sauve la princesse, right? Là, on voit déjà le rôle passif/actif, on n'ira pas là-dessus. Elle fait juste changer de château à chaque fin de monde, mais au final, la destinée de Peach, c'est d'être prise captive par Bowser, le gros Toto, ou être kidnappée de nouveau par Mario, dont elle se torche. Elle n'a aucun intérêt. C'est incroyable quand même elle (rires). Sa destinée est déterminée par ces deux modèles d'hommes, sauveurs ou l'homme agresseur, finalement. Bref, et ça, c'est partout. À partir du moment où on voit ça, ces rôles-là, ils sont campés d'un bord à l'autre. Quand même intéressant. Je n'avais jamais vu cette réflexion-là jusque dans les jeux vidéo. Partout. Partout. Partout. Partout, nous dira Marie-Ève (rires). Tsé puis, quand on parle de partout, on peut penser à plusieurs séries, plusieurs films, la musique aussi. On pourrait en faire une grande discussion. Une très grande discussion, tout à fait. Après, est-ce que ça veut dire qu'il faut cancel toute la patente? Non. Mais est-ce qu'on peut se permettre de le réfléchir puis d'en discuter, par contre, sur les modèles qu'on propose? Parce que, comme on disait, on l'a tout intériorisé, puis on est toutes parties intégrantes de cette culture-là. Et bien oui. À voir tsé qu'est-ce qu'on en fait. Je reviens un peu en arrière, on a parlé un peu des impacts, on parlait de banalisation, normalisation, on vient en discuter largement. Ça peut prendre aussi d'autres formes dans le day-to-day, tsé tolérer certains comportements.
Genre:« Oui, mais il y est de même lui, il est toucheux. » Oui, oui, oui.« Tsé, il est de même, ce n'est pas grave. » J'en ai parlé, moi, dans un premier épisode. Mon premier patron, il me massait les épaules, très<i> touchy,</i> très dans la bulle,
mais c'était comme:« Et bien il est de même. » Puis j'imagine qu'il faisait ça avec tes collègues masculins? Non. Il y avait cette partie-là, tu as 12, 13 ans, tu te dis: « Moi, ma bulle, je l'aime dans le fond de ma bulle. Puis là, il rentre dans ma bulle. Je ne suis pas confortable », mais c'est comme: « Ah il est touchy, il est sympathique, il est comme ça.» Très banalisé, très dérangeant, rendait très inconfortable. Exact. Et à qui vient la responsabilité de se prémunir de ces situations-là? À moi là. Et bien c'est ça aussi. De l'éviter en courant ou? Parce que, est-ce qu'il y a des actions, des interventions qui sont prises sur la personne qui commet le geste? Non. Non. On fait juste faire comme... C'est normal, ça fait partie de...... Il est de même. C'est ça. C'est chill. Voilà, tsé fait que ça va être ça aussi, tsé quand on parlait d'encourager, peut-être pas directement des agressions sexuelles, mais tsé l'humour est un grand vecteur. Quand on fait certaines blagues qui sont un peu décalées, puis qui utilisent cette imagerie-là d'agression sexuelle, puis qu'on en rit, on vient le banaliser. Un exemple que je prenais souvent parce que bon, encore une fois, je travaille avec des ados, fait qu'on est dans le milieu scolaire tout le
temps, mais le fameux:Je viens de me faire...(insérer ici n'importe quel acte sexuel possiblement dégradant) par mon examen genre. Oui! Qu'est-ce que ça va dire sur l'expérience de violences sexuelles? Toi, en tant que victime, mettons, tu entends ça, puis tu dis: « Dans le fond, ce que j'ai vécu comme violences, c'est à peu près... Comparable à avoir... Ce n'est pas plus mal que d'avoir échoué son examen de maths. C'est très drôle que tu l'amènes parce qu'on a un segment qui est sorti
par rapport à ça, sur le fait de dire:« Je me suis fait violer par mon examen, on s'est fait violer par l'autre équipe » ou quoi que ce soit, considérant qu'il y a une personne sur sur trois autour de toi qui a été victime de violences sexuelles, il y a probablement quelqu'un qui va t'entendre, puis que ça va toucher, puis que ça va blesser. Assurément tsé, assurément. C'est drôle parce qu'avec les jeunes avec qui j'intervenais, une des choses qu'elles
me disait systématiquement, c'est:« Ce genre de joke-là me dérangeait pas avant, je les notais pas, mais maintenant que j'ai vécu des violences sexuelles, elles me font réagir systématiquement. » Fait que ça en dit long, sur... quand même l'impact de ce que certains mots là... Tsé, la personne qui dit ça, puis on l'a toutes déjà fait cette blague-là, assurément. On l'a toutes déjà fait, mais on n'a pas d'intention d'être... il n'y a pas d'intention violente dans cette prise de parole-là, dans ce commentaire-là. Souvent, il y a beaucoup de ça aussi et d'incompréhension quand on parle de culture du viol, c'est qu'il n'y a pas de mauvaises intentions nécessairement. On fait juste véhiculer des trucs, puis ça crée un climat d'insécurité pour les victimes qui font en sorte que c'est ça, tu overthink un peu ce que tu as vécu, tu n'es pas trop sûre de ce que c'est
finalement, puis tu te dis:« Et bien là, si c'est aussi pire que de courir un examen de maths, tsé, je veux dire, je vais me taire, je vais overcom. » Je vais en revenir. Et bien voilà, je vais finir par... je vais me réveiller un jour, ça va bien aller. Ça va être correct. Ça va passer. Ce n'est pas tout le temps ça. Non. Non. Pas tout le temps ça, fait que ça crée des situations comme ça. Dans le langage aussi, tant qu'à être là-dedans, moi j'aime bien tout ce qui est... C'est quoi? C'est des litotes, je crois que ça s'appelle, une espèce de forme d'atténuation. Oui, comme beaucoup dans le: « Oui, mais tsé... justement, ça a juste duré une soirée, ça a juste été une fois ou ce n'est pas vraiment...» Toutes les façons de comme revirer ça pour atténuer un petit peu ou faire sentir la personne comme si elle l'exagère tandis que ce qu'elle vient de te partager, c'est comme: « Non, mais dans le fond, ce n'est pas si grave que ça si on regarde ça d'une autre façon ou... » C'est juste des attouchements. Ça aurait pu être pire. Il y a tout ça aussi dans la façon qu'on va parler de ça, quand on parlait tantôt, le fameux « relation sexuelle non consentante. » On peut-tu en revenir? Ça n'existe pas. Non puis tsé, je veux dire, je l'ai entendu pas plus tard que la semaine passée. Constamment, constamment. Ça, c'est une belle façon justement d'amenuiser ce que c'est réellement qu'une agression sexuelle. Parce que comme je le disais plus tôt, il n'y a rien de relationnel, il n'y a pas de dynamique ou de réciprocité dans une agression. Une relation sexuelle, c'est un plaisir partagé par deux personnes qui sont consentantes, deux personnes ou plusieurs, qui sont consentantes à cet acte-là. Ne viens pas me dire qu'une relation sexuelle non-consentante. Ça ne fonctionne juste pas. Avec les deux définitions, ça ne fonctionne pas. Ça n'a pas de sens. C'est ça, c'est toutes des façons, justement, de parler d'agression sans parler d'agression, finalement. C'est ça. Puis de rendre ça un peu tranquille. Oui. Puis après, c'est important, cependant qu'on en parle aussi. Ça, c'est un autre impact vraiment majeur de cette culture-là, c'est qu'on renvoie les victimes, les personnes qui veulent parler, pas juste les victimes, les personnes qui veulent discuter, échanger sur ces réalités-là, au silence. Oui, vraiment. Comme vas-y pas. Puis, un des gros mécanismes de ça, qui est une des très grandes conséquences de cette culture du viol-là, mais qu'on voit systématiquement au près d'à-peu-près l'ensemble des victimes à un certain niveau ou à un autre, c'est la honte. La honte qui est un sentiment moral très puissant, très important dans nos sociétés. C'est par la honte quand on pose un geste un peu indélicat,
qu'on va faire comme:« Je ne me sens pas bien, je ne le referai pas. » Je ne suis pas à l'aise. Je ne suis pas à l'aise. C'est étrange, tsé tu pars à rire dans des funérailles, tu es comme: « C'est peut-être inadéquat. »« Ce n'était pas ma meilleure. »« Je me sens un peu gênée. » Fait que cette honte-là, c'est un mécanisme d'apprentissage social vraiment important. Oui. L'affaire, c'est qu'avec la culture du viol, cette honte-là, elle n'est comme pas du bon bord du tout. Elle est plus dans justement la victime qui va avoir subi des gestes, la personne qui va avoir vécu ces gestes-là, qui, elle, va faire comme: Je me sens honteuse justement d'avoir vécu ça. Puis, socialement, on me dit que dans le fond, ça ne devrait pas être pire ou que je devrais m'en remettre ou que tous les messages dont on a parlé.
Puis, tu dis:« Ok, qu'est-ce que je fais avec ça? » Et bien je me tais. Puis, on maintient les tabous, on maintient l'omerta sur ces réalités-là. Ça continue à se passer. Il y a un malaise assez commun quand on parle de violences à caractère sexuel. En général, moi, ça fait partie de mon travail, c'est quelque chose que je vois à toutes les semaines. Je peux compter sur cette main-là, le nombre de fois que les
gens m'ont dit:« Comment ça va au travail? » Moi, ce n'est pas quelque chose que les gens me parlent, mais mon copain à côté de moi: « Puis toi, comment ça va le travail? » Mais moi, jamais, jamais, jamais, on ne va me le demander parce que... C'est sûr que c'est lourd. Ça l'ouvre un sujet qui les effraie là. Ils ne sont pas à l'aise du tout. Tout à fait. Puis tsé, je ne suis pas une victime, je travaille dans ce milieu-là, fait que je n'imagine même pas comment ça peut être difficile en tant que personne victime de s'avancer puis d'en parler. Surtout considérant que la majorité des agresseurs sont connus par les victimes et leur réseau. Exact. Fait que ça rajoute aussi une dimension dans la discussion. Oui, c'est sacrément puissant la honte pour entretenir justement ces croyances puis ces attitudes-là. Puis ça devient extrêmement compliqué, comme tu l'as mentionné, d'en parler. Et c'est là où, quand on parlait de rôles à jouer, être en mesure d'amener ces discussions-là, puis de parler de violences sexuelles, ça n'a pas besoin d'être lourd tout le temps. Non, vraiment pas. Dans le travail, moi, je ne pleurais pas à chaque fois. Je n'étais pas, non, vraiment très stoïque à chaque fois que je rentrais au bureau, quand j'étais dans ce milieu-là, loin de là. C'est important aussi d'amener cette capacité-là à discuter de sexualité, à discuter de violences sexuelles, qui sont deux choses absolument distinctes. Et de façon normale. C'est ça qui doit être plutôt banalisé plutôt que la commission, la perpétration de gestes ou de paroles qui sont problématiques. Ça a du sens tout ça quand même? Oui, c'est quand même, on est parties en force. Quand même. On a parlé de tout ça, mais il y a des choses qui se passent en ce moment qui sont fascinantes quand même et qui participent ou ne participent pas à la culture du viol,<i> right.</i> Ce n'est pas clair? On ne sait pas trop. Ça aussi, c'est fascinant parce que c'est tout le temps, comme on parlait, dans la mouvance, fait que ce qui aujourd'hui, on considère comme tolérable, peut ne plus l'être demain. Exact. Et inversement. C'est en constant comme changement. Je ne sais pas si... et bien en fait, toi, je sais que tu es une BookTokeuse. Oui (rires). Fait que tu as assurément vu tout ce qui se passe sur le BookTok. Le BookTok, Oui, j'ai découvert un univers fantastique. Fantastique. Il y a beaucoup de choix et on nous présente beaucoup de styles de lecture.
J'ai eu la surprise de me dire:« Mon Dieu, on a suggéré ce livre-là. » Tout le monde dit que c'est un quatre étoiles, cinq étoiles et je me suis lancée aveuglément dans certaines lectures pour faire: « Ben voyons donc, c'est quoi ça? »
Fermer le livre et me dire:« Wow, qu'est-ce que je viens de vivre? » Je ne pense pas que je vais le finir, ce livre-là. Parlons-en, le dark romance. Le dark romance, l'espèce de trend du moment dans la littérature TikTok. Phénomène intéressant, somme toute. Oui. C'est très nuancé. On en discutait d'enregistrer, c'est très nuancé. Très nuancé, c'est particulier pour les gens qui ne connaissent pas la dark romance. Ce sont des bouquins, des autrices pour beaucoup d'ailleurs, majoritairement des autrices, qui vont romantiser finalement des scénarios où généralement, on fait l'homme dans le... On est dans la romance, on est assez dans des... Très hétéronormatif. Exactement, on est beaucoup dans des relations hommes-femmes, hétéro. Donc un homme qui va être généralement un anti-héros, un vilain, quelqu'un de justement très viril, puissant, un rapport d'autorité, un riche, généralement. Et quelqu'un, tsé, cet homme viril alpha, solide épeurant. Ils ont quasiment tous la même description physique d'un livre à l'autre. Il n'y a pas beaucoup de recherche à ce niveau-là (rires). Pas tout le temps, non. La couleur de cheveux change, parfois. Oui, il y a ça. On va leur donner ça. Le chandail, le style vestimentaire et la profession. Mais toujours très riches. Toujours en position d'autorité, un certain standing, au travail, la maison, les autos, tout ça. Puis un peu indélicat, généralement, pour le dire ainsi. Oui, je te trouve quand même gentil dans le choix des mots. Quand on parlait de banaliser, justement, c'est un exemple. Belle forme ici. On parlait de délicatesse. On est plutôt vraiment là.... où il va accrocher une femme, femme ou adolescente. Oui, la notion d'être majeure. On est tout le temps sur une ligne très floue. On ne s'embarque pas là-dedans dans ces livres-là. Ce n'est jamais clair. On ne le nomme pas trop. Est-ce qu'elle a 16 ans ou 21? Elle est encore à l'école, mais ce n'est pas vraiment clair à quel niveau. Elle habite chez ses parents, mais... Mais... Puis elle a des très, très jeunes, très belles... Dans la description, on imagine quand même souvent une jeune femme de 15, 16 ans mettons. Exact, dans la description, tout porte à croire. Souvent, ce sont des femmes qui vont être décrites comme n'ayant que très peu d'expérience sexuelle, qui vont justement tomber en fantasme, vont fantasmer sur cet homme. Oui. Puis souvent, des jeunes filles qui viennent de vivre quelque chose de tsé... Des abus, des violences. Des abus, des violences, la perte d'un proche, tout ça là, qui les rend très vulnérables en fait. Oui, et qui les amène à se requestionner sur leur rapport à la vie et qui là vont s'intéresser à ces hommes qui leur offrent un modèle complètement différent de ce qu'elles avaient eu comme possibilité de relations auparavant, qui, rappelons-le, sont à peu près inexistantes, parce que c'est généralement des femmes qui ont eu très peu de relations. Exactement. On met beaucoup l'emphase là-dessus. Il y a beaucoup de ça, cette idée-là de pureté. On est vraiment là-dedans. C'est ça, on est dans des scénarios. Après ça, justement, cet homme-là, on peut imaginer, va s'intéresser à cette jeune femme-là, mais va l'amener aussi, de façon plus ou moins claire, à vivre des expériences sexuelles qui ne sont jamais, là non plus, très claires. De quelles façons le consentement est établi ou pas? Là aussi, ce n'est jamais vraiment abordé. Il y a tout un univers de fantasmes dans cette<i> dark</i> romance-là qui va explorer le fameux CNC, le consensual<i> non consent,</i> donc le consentement non consenti. Exactement. En français, je l'utilise rarement. Je ne sais pas. La traduction me semble fausse, mais on aura compris. Mais je pense que oui.<i>Consensual non consent.</i> Donc, mais, ce n'est jamais vraiment discuté entre les personnages, de quelles façons ils établissent les limites et les barèmes. Ils ont consenti à ça? Tsé c'est correct, là, du CNC... Ça peut. C'est ça, ça peut l'être. Quand c'est bien... Quand c'est validé, discuté. Quand c'est bien discuté, mais là, on n'a comme pas l'impression que ça l'a été tant discuté que ça ou que... très peu. Très peu. Puis, on va dans des scénarios, justement, qui vont inclure, de façons plus ou moins graphiques et des fois très graphiques, très graphiques, des scénarios d'agressions sexuelles. Vraiment, avec violences physiques, tout l'imaginaire. Quand on parle de très graphiques, il y a des scénarios qui sont absolument troublants. Et puis, le public de cette dark<i> romance-là,</i> c'est majoritairement des femmes. Oui, majoritairement des femmes. On pourrait en être surprises et pourtant, ça a quand même du sens. C'est là où vient la nuance, parce que là, on en parle, justement, puis j'ai un certain malaise quand même avec cette imagerie-là, surtout qu'elle peut être bien encouragée, soutenue par une très grande partie de la pornographie, qui est accessible assez aisément sur les interwebs. Mais il y a comme un certain malaise qu'on ressent quand on en discute, n'est-ce pas? Oui. Mais en même temps, ce qui est intéressant, c'est que je suis allée farfouiller un peu là-dessus, c'est quelque chose qui est utilisé beaucoup par les femmes adultes, notamment. Ça va être important la différence, je pense, entre femme adulte et femme ado. Jeune femme, donc pas... Bref, comme une façon de rendre compte que pour particulièrement les femmes et les personnes assignées comme telles, la vie, elle est difficile, elle peut être parsemée de grands deuils, de grandes violences, surtout comme je l'ai mentionné, quand on est femme. Et donc, ça amène cette espèce de, je vais fuir un peu cette réalité-là, valider que j'ai ce vécu-là, mais ça va, puis et bien on est dans la romance. Donc, il y a une belle fin. La fin est belle. Ça finit très rarement de façons négatives. Ça finit toujours bien en couple avec cet homme qui violente finalement la personne, mais ça finit bien. Et donc ça amène cette idée-là pour les personnes qui vont être vraiment très adeptes de cette littérature-là, que... Ça va bien finir.... on en survit. On passe par-dessus, puis on finit par en faire quelque chose de bien et d'agréable dans notre vie. Ça peut être un escape cope. Oui, un échappatoire. Une sortie, une échappatoire, merci, qui est vraiment intéressante pour bien des femmes. C'est aussi une façon de se déconnecter un peu de cette réalité-là,
puis de dire:« Ok, je ne suis pas seule à avoir vécu des situations », comme aller légitimer certains fantasmes qui peuvent être alimentés à la suite d'agressions sexuelles par ailleurs. Puis, pour certaines femmes, et bien justement, particulièrement celles qui ont vécu des abus sexuels, des agressions sexuelles, ça contribue aussi à virer ça un peu en espèce de triomphe, à donner un espèce de pouvoir à la
lectrice de dire:« Ok, je le lis, ça va, ça se passe comme ça », mais justement, la personnage féminine, elle en fait quelque chose. Oui. Il y a aussi cette reprise de pouvoir par la lectrice. Le fait que ça peut être un outil intéressant pour un processus de questionnement identitaire à la suite, finalement, des agressions. La nuance, elle arrive plus, je dirais... Moi, le livre que je parlais, que je ne nommerai pas, mais il n'y avait pas de trigger<i> warning</i> au début. Non. Donc moi, je pensais que je lisais un livre de romance. Puis, je veux dire, j'ai été influencée totalement, mais je me remets à la place de Juliette, 15 ans... Tu tombes là-dessus mettons.... j'aurais été autant influencée. À cet âge-là, ayant eu un peu de contact avec la sexualité, lire un livre comme ça, c'est quand même une... On parle beaucoup de pornographie qui, quand elle est mal utilisée, peut devenir une sorte d'éducation sexuelle chez les jeunes. C'est la même chose. C'est la même chose. C'est ça, c'est un peu de la pornographie. Oui. Absolument. En effet, quand tu es une femme adulte qui lit ça, la différence entre la fiction et la réalité, elle se fait assez facilement. Tu sais un peu plus que ce que généralement, pas tout le temps, par ailleurs, ce que tu aimes comme sexualité, c'est quoi? Jusqu'où tu va? C'est quoi tes limites? Tu as un historique, tu as une histoire. Oui, exact. Comme tu dis, quand c'est tes premiers contacts, pour beaucoup, le public, tsé TikTok, oui, il y a des adultes comme nous autres qui traînent là-dessus visiblement, mais c'est pour beaucoup des ados. Oui, oui. C'est là le petit malaise qu'on peut entretenir et dont on pourrait discuter. C'est là où est-ce que... On peut parler peut-être de banalisation de certaines formes de violences. Comme tu dis, rarement des trigger<i>warning,</i> puis particulièrement en ce qui a trait au consentement non consenti. Ce n'est jamais vraiment présent dans les triggers, ce n'est jamais vraiment établi, ce n'est jamais vraiment clair, c'est là underlying, mais on ne sait pas trop. Ça aussi, ça peut venir brouiller la définition de ce qu'est le consentement, particulièrement pour les jeunes. C'est ça. C'est là que ça vient, oui, ça peut être quelque chose de positif pour certains, mais quelque chose de négatif pour d'autres. En tout cas, glissant. Glissant... Glissant, seul là, pris seul mettons. Exact. Parce que tsé, je veux dire, j'ai des jeunes femmes dans mon entourage qui en lisent des livres comme ça, puis qui me disent: « Moi, je lis ça, mais jamais je voudrais qu'on me parle comme ça ou qui me traite comme ça », puis je le sais. Sauf que quand tu arrives à 14, 15, tu lis ça, puis tu te dis: « C'est tu ça? » C'est ça, puis quand premier contact à la sexualité, c'est quelqu'un qui, justement, peut-être un peu pushy sur tes limites, plus que tu le voudrais, mais tu n'as pas de modèle, finalement, de comment établir ces boundaries-là. Ça devient... Ça peut devenir un peu glissant. Glissant, j'aime le terme. Tout à fait. Mais ça fait un peu quand même partie de cette fameuse culture-là. Oui. Voilà. Exemple de culture... En fait, tsé on parle de dark<i> romance</i> depuis tantôt, comme si c'était un phénomène nouveau, mais on va quand même se le dire, je veux dire La<i> Belle la Bête,</i> mettons. Oui, on part de la base. Cette femme qui se fait enlever par un monstre, pas particulièrement attirant par ailleurs et qui, finalement, tombe en amour avec et qui décide de faire sa vie, décide... Là aussi, on pourrait questionner un petit peu à quel point elle décide là, mais il décide de faire sa vie, donc avec cet homme, on est pas mal dans un scénario classique de dark<i> romance.</i> Qui habite dans un château, qui... Gros standing. Oui, quand même là, si tu regardes ça comme ça... Oui, oui, fait qu'on est un peu là-dedans. Moi, une série que j'ai beaucoup appréciée, puis c'est tout le temps aussi tsé... You, là. Bien aimé, moi aussi. Oui, c'est super intéressant, mais si on ne questionne pas... Il y a des moments, je ne sais pas. Encore une fois, You, le synopsis de base, on suit cet homme dont le nom m'échappe. Moi aussi, mais... Joe? Joe, oui. On suit Joe, qui est un stalker. Oui, absolument. Il va suivre et il va créer des situations où est-ce que sa victime, parce qu'on est là-dedans, la femme avec qui il est en amour, n'aura pas d'autre choix que de tomber en amour avec lui. Oui, c'est ça. Genre tous les paramètres. C'est ça qui est ça. Il n'y a pas d'option. Il est de façon de très soft à très violente par ailleurs. Oui, ça peut être très intense. Il élimine la compétition assez littéralement. Oui. Mais ça aussi, je ne sais pas toi, mais tsé il y a des moments où tu
te dis:« C'est attachant. » Oui, il y a des moments d'arrêt que je suis comme... Ils sont quand même cute ensmeble.
Oui, puis au début, tu es genre:« Il fait juste la regarder quand elle marche ou il
la suit un peu », puis tu es comme:« Ce n'est pas si pire. » Après, c'est clairement un problème, ces comportements-là déjà. C'est dangereux, mais là, on se dit: « Il fait juste... » Il fait juste ça.
On en parle tantôt, on l'a dit:« Oui, mais c'était juste ça. » C'est exactement ça, puis on le dit. Puis on s'attache quand même au personnage. Puis on lui souhaite presque que ça marche. J'attends la prochaine saison avec impatience. Puis il y en aura une. Il y en aura une. C'est ça. C'est ce que je trouve qui est le génie derrière cette série-là, d'ailleurs, c'est cette capacité-là à nous amener à nous attacher à ce personnage-là qui est absolument problématique, violent, agresseur à tous les niveaux, pas juste en termes de violences sexuelles, à tous les niveaux, mais on en vient quand même à s'attacher puis à l'haïr en même temps, mais... C'est une relation très conflictuelle. Oui, mais c'est le génie de cette série-là, comme je l'ai dit, mais ça reste que je trouve que c'est un bel exercice à faire, à écouter, puis à voir comment on se positionne. À un moment donné, c'est ça, ils rendent ça assez évident que ça n'a pas de bon sens. Non, non. Mais le temps que ça prend avant de te rendre compte que ça n'a pas de bon sens tsé. Tu es comme un petit peu... Ce n'est pas si pire... Puis après, ça te fait te questionner sur qu'est-ce que toi, dans tes relations, qu'est-ce que tu fais comme formes de contrôle ou pas, comment toi tu as réagi? Moi, en écoutant cette série-là, il y a eu plusieurs moments que je pesais sur pause, puis j'étais comme: « Pourquoi je trouvais ça normal?» J'ai comme trouvé ça normal.
Puis après ça, j'étais comme:« Non. » Mais tsé, j'étais envoûtée par le tout, puis j'y allais. Exact, exact. C'est des apprentissages aussi tout le temps, des relations. Puis déceler ces formes de banalisations-là, ça demande justement une prise de recul. Puis des fois, de les avoir dans ta face de même, avec certaines séries, notamment celle-là, et bien ça aide. Fait que ça peut être un bel outil, justement. Ce n'est pas toujours problématique, ce truc. Même chose, comme on dit, avec le dark<i>romance,</i> ça peut être un bel outil, mais quand on a cette capacité de recul. Exact. C'est souvent ça l'enjeu. Voilà. Ensuite, niveau culture, on a tu d'autres choses, d'autres exemples? Je pense qu'on en a sorti quand même deux très bonnes. Deux très solides. Disney aussi en général, avec La<i> Belle la</i><i>Bête,</i> ce n'est pas le seul, rappelons le classique La Belle<i> au bois dormant</i> qui tombe en amour avec cet homme alors qu'elle dort depuis 100 ans... Oui, oui.... la réveille d'un baiser tendre. Blanche-Neige qui lui donne un bisou, puis elle dort. Oui, c'est ça. Puis, tout l'enjeu avec les nains aussi dans Blanche-Neige. Tout ça est spécial. Tout ça est particulier. On en aurait long à dire là-dessus. Sur Disney tsé, puis encore dans les dernières réalisations aussi, même si on a des personnages féminins plus actifs, qui ont des rôles plus actifs, il y a quand même tout le temps ce petit scénario-là en dessous. C'est quoi que j'ai vu aussi dernièrement qui était super intéressant? Ah, ça aussi, ce n'est pas dans mes habitudes de tripper vraiment sur ce genre de série-là, mais je suis vraiment tombée en amour avec Bridgerton. Oui! Comme oui. Qui n'a pas aimé Simon dans la première saison? Oui. Mais ça aussi, c'est attachant. C'est magnifique, quelle esthétique incroyable. Mais au final, quand on regarde la façon que c'est la plupart des relations qu'on voit s'établir dans les différentes saisons, puis notamment dans la dernière d'ailleurs, il y a des petits trucs un peu particuliers là aussi. Tsé, qu'on passe, puis qu'on passe comme normal, mais qui fait partie de certaines formes de contrôles, certaines formes de violences, puis qu'on accepte. Qu'on accepte parce que... C'est presque romantique. Oui, j'entends beaucoup dans les discussions que j'ai avec
mes pairs:« Oui, mais dans ce temps-là, c'était comme ça. » Dans quel temps<i> Bridgerton</i> se tient, tu peux me dire? C'est comme pas vraiment... C'est parce que comme ça n'existe pas Bridgerton. On n'est pas obligé de faire ça comme dans le temps, qui on ne sait pas là. Oui, exact. On entendait la même chose de Game<i> of Thrones.</i> Je suis comme, mais dans quelle époque Game<i> of Thrones</i> s'est tenu, s'il vous plaît? J'aimerais avoir des preuves. Je veux dire, ça tient pas mal présentement parce que c'est une production culturelle qui adopte les codes culturels d'aujourd'hui. De maintenant. Et c'est ça qu'on met en scène dans un univers fictif. Exact. Fait qu'on est en droit de questionner ces représentations-là, puis en arrêtant d'utiliser l'argument, l'histoire, qui en est un faux. Ça va aller. Ça va aller, c'est ça. On est capable de faire mieux quand même comme argumentaire. Mais oui, toutes ces superproductions, je veux dire, tout, en fait. Oui, on pourrait en nommer plein de séries, de films qui sont sortis, mais Bridgerton, je pense que ça touche beaucoup de personnes parce qu'il y a tellement de monde qui l'ont écouté. C'est si bon. Oui, c'est très bon, c'est très bon! Moi, je suis l'amie, par contre, un petit peu plate qui dit: « Oui, mais est-ce que tu as remarqué que...? » Là, j'amène les petits trucs comme ça, puis je suis comme: Party pooper. On peut en parler, si tu veux (rires). Mais c'est intéressant d'avoir ces discussions-là, justement. Ça ne fait en sorte que j'aime moins Bridgerton. Non. Mais je suis capable de faire comme: « Et bien là, franchement. » Ce n'était pas top. Puis, à l'inverse, on a aussi des séries vraiment chouettes, qui abordent ces sujets-là de fond, qui sont vraiment intéressantes. Puis, au Québec, j'écoute beaucoup de productions québécoises. Au Québec, j'en ai deux qui me viennent en tête, qui, plus récemment, Sans<i>rendez-vous</i> avec Magalie Lépine-Blondeau, qui est comme une infirmière clinicienne, dont le rôle est un peu particulier d'ailleurs, mais ça aussi, là, on l'aborde de front, ces enjeux-là, puis c'est comment on établit des limites dans les relations. On va parler directement des enjeux de violences sexuelles, puis des scénarios qui sont un peu problématiques entre certains personnages. Vraiment très chouette à écouter puis à décortiquer avec ses amis, quand on écoute avec ses amis, ses parents, ses proches, peu importe, les personnes avec qui tu écouteras cette série. Quelqu'un qui peut s'asseoir avec moi et l'écouter. Ou à la limite, toi et tes chats ou tes chiens, c'est correct. Tu peux te parler à toi-même et te questionner toi-même sur ce que tu es en train de visionner, c'est correct. Puis aussi Les<i> Simone,</i> qui est, à mon sens, une série nécessaire à regarder de toute façon. Je la réécoute une fois à peu près par année. Ça, c'est une très bonne chose, c'est tellement bon!
À toutes les fois, je suis comme:« Mon Dieu que c'est bon. » Puis, là aussi, on l'aborde assez directement, on est vraiment là-dedans. C'est de front. Oui, tout à fait. Puis il y avait un peu de, et bine non, j'allais dire un peu l'équivalent des Simone, vraiment pas, mais de par le fait qu'on suivait quatre gars, qui est l'émission Les<i> Mecs,</i> si je me rappelle bien, avec Christian Bégin, notamment, Alexis Martin et d'autres. Ça aussi quand même intéressant de voir comment que c'est abordé entre hommes, même si on peut critiquer cette émission-là pour bien des raisons. C'est vraiment un peu du bonbon quand même pour ces aspects-là. Bref, on peut tout. C'est ce qui est le fun quand on aborde la culture du viol aussi, c'est qu'elle est, considérant qu'elle est partout et qu'elle nous entoure, on peut tout regarder avec cette espèce de
lunette critique-là et se dire:« C'est quoi cette représentation-là? Qu'est-ce que j'aimerais peut-être qui change? Qu'est-ce qui me rend mal à l'aise? Ou qu'est-ce qui me rend pas mal à l'aise et que je prends pour normal, naturel, que je n'ai jamais questionné, puis que ça vaudrait peut-être la peine que je le réfléchisse autrement ? » Ou que je me dis: « Pourquoi pour moi, la réponse est de même? » Ça va de soi que c'est comme ça. D'où ça vient, ça, ce ça<i> va de</i> soi-là? Fait que prendre ce petit recul-là. Exact. Je pense que le meilleur exemple qu'on a vu dans les dernières années, India Desjardins qui a écrit le livre La<i>glamorisation des amours toxiques.</i>
Elle l'a dit dans les podcasts:« Ça m'empêche pas d'écouter mes petits films,
puis tout ça. » Sauf qu'elle dit:« Maintenant, j'ai l'œil critique de faire, mon Dieu, ça, ça n'a pas de bon sens », ou quoi que ce soit. Puis c'est ce que j'ai trouvé, j'ai trouvé que c'était un vent de fraîcheur en fait parce que je suis critique par rapport à ça.
Je me disais:« Mon Dieu, je pourrai plus rien écouter. Ça n'a pas de bon sens. » Tsé, c'est tellement teinté partout. Avec ce podcast-là que j'ai écouté, je me rappelle plus de l'épisode ou quoi que ce
soit, mais je me suis dit:« C'est vrai dans le fond. C'est des films que j'écoute depuis tellement longtemps. Je suis capable de dire que ça a pas de bon sens à l'âge que je suis rendue, mais je vais pas m'empêcher de tout écouter mes films préférés. » Non, puis de la même façon qu'on ne s'empêche pas de vivre dans le monde qui nous entoure. Exact. Parce que si on décide qu'on se coupe complètement de la culture du viol et qu'on la refuse et qu'on n'en fait plus rien, tu vas vivre tout ça chez vous. Puis encore, tu vas en être quand même imprégnée. Oui, oui. Tu vas avoir quand même des réflexes, des pensées intuitives qui vont intuitivement en fait dans l'univers, certaines formes de banalisation des violences sexuelles. C'est important de plutôt prendre un rôle actif sur... C'est ça, déboulonner ces clichés-là, notamment. Tranquillement, mais sûrement. Tranquillement, mais sûrement. On va l'avoir. Tout à fait. Ça bouge quand même. Il y a de l'espoir. Oui, oui. On est vraiment ailleurs. On est ici, puis on en parle. Il y a des gens qui vont nous écouter, il y a des gens qui... Oui, puis on en a beaucoup parlé dans les dernières années aussi, quand même. C'est mieux qu'avant, mais on peut encore...... on peut toujours s'améliorer. Exact. Il n'y a jamais de fin (rires). Donc on a quand même donné beaucoup d'exemples dans les médias, tout ça, on va en aborder aussi dans d'autres épisodes. Inévitablement, on a toutes des références, mais on a aussi certains termes ensemble qu'on voulait discuter. Dans l'introduction, tantôt, j'ai dit qu'il y avait certains... D'autres concepts. D'autres concepts qui, parfois, c'est juste un manque de compréhension ou c'est quoi exactement. Je pense que ça pourrait être intéressant de les regarder ensemble, puis voir c'est quoi ce nouveau petit dictionnaire-là? Que c'est ça, ces concepts-là? Oui. Est-ce que tu te lances avec un premier? Un premier, qu'on a un petit peu abordé implicitement, mais pas directement, puis qui fait, je pense, une belle transition vers ce qui viendra. Quand on parle de slutshaming, entre autres, on entend aussi ça quand même souvent, ou en français, c'est plutôt phobie qui a été généralement adoptée, que j'aime moins. En tout cas, j'utilise... Oui, c'est ça, le slutshaming. Le slutshaming, qu'est-ce que c'est? Qu'est-ce que c'est et d'où ça part? À quoi ça réfère tout ce vocabulaire-là? Où est-ce qu'on va utiliser des références à la salope, à la prostituée, à cette imagerie, encore une fois, on est dans les représentations très clichées, très stéréotypées de cet univers de la prostitution, du travail du sexe, mais de façon à ce qu'on va se servir de ça pour dégrader des femmes d'avoir adopté certains comportements ou d'avoir d'avoir subi certains gestes, certaines paroles, d'avoir réagi de certaines façons.
Le fameux:« Tu es donc bien habillée comme une pute. » Oui, ça, c'est quand même le classique. Le classique, ça peut aller bien plus loin que ça quand même. Puis ça, ça part d'où? On parlait des représentations hommes-femmes. Mais la femme là, puis ici, j'utilise la femme comme le modèle générique, comme s'il y en avait juste un. On s'entend que ce n'est pas... On est vraiment pas là, elle a le droit, dans la vie, à un rôle traditionnel qui est valorisé, puis qu'on entend beaucoup dans certains podcasts de ce temps-ci d'ailleurs, plus traditionnalistes. Cette idée-là que la femme, comme si elle existait, doit être une bonne épouse à l'écoute, caring, comme on parlait tantôt, qui va suivre son homme et l'aider à devenir meilleur. C'est correct, je veux dire oui, indeed. Ce n'est pas sa seule passion, par contre. Non, c'est ça. Tu n'est pas obligée de...... une bonne mère. Une bonne mère, ça vient, elles sont mères. C'est ça son rôle. Fait que tsé qui va être vraiment là pour finalement faire briller les autres. Oui, le caring, s'occuper de l'autre, le faire briller, puis elle se reculer. Ce n'est pas elle qui a l'attention. Elle n'est pas au premier plan. Non, du tout. Voilà. Puis si bien elle ne tombe plus dans ce rôle-là, le seul rôle qui lui reste, c'est celle de la dévergondée, pute, salope. Name it. Choisis. C'est tous ces termes incroyables et repris pour dégrader, alors que par ailleurs, je veux dire, le travail du sexe est une réalité là, dans laquelle certaines personnes peuvent être bien, c'est qu'on n'est pas... Il y a ça aussi. On fait mal aux femmes et on fait mal aux femmes travailleuses du sexe et a toutes ces autres personnes aussi qui sont impliquées dans cette industrie. Bref, quand on vient slutshamer, on vient aussi renforcer renforcer l'idée que ces femmes-là valent moins dans la société. Oui, puis on ne rentrent pas dans un cadre préconçu. Qui serait normal. Oui, c'est la normalité. Quelle normalité, en fait. À partir du moment que tu sors de ce cadre-là, tu tombes la salope et donc tu n'as plus aucune valeur et tu mérites peut-être, finalement, de vivre certaines formes de violences parce que tu as couru après en sortant de cette case. Tu l'as cherché, voyons. C'est ça. Tu avais juste à être tranquille, puis à faire briller ton homme. À rentrer dans le cadre. Exact. Slutshaming en trois secondes et quart. Oui, très bien décrit, je pense. Je vais dire semi-bref, mais oui, en tout cas... Plus que trois secondes, mais quand même très bien décrit, oui. Exact. Ensuite, je pense qu'il y a un terme, moi, que j'entends souvent, qui est gaslighting.<i>Gaslighting,</i> oui, on en entend beaucoup parler. Je trouve qu'il y a de plus en plus de gens, gaslighting, mansplaining, tout ça, on en parle beaucoup. Puis, je ne sais pas toi, c'est même rendu un peu dans le vocabulaire très day-to-day, très habituel, même dans la blague, genre: « Arrête de me gaslighter. » On l'entend beaucoup, mais à quoi on réfère? Est-ce qu'on sait vraiment? Est-ce qu'on sait vraiment c'est quoi? Le terme français, attention, c'est encore pire que putophobie, pour le gaslight, c'est détournement cognitif. Donc à partir de maintenant, on veut utiliser gaslight. C'est affreux comme traduction détournement cognitif, mais c'est exactement ça. Par contre, il y a l'avantage d'être beaucoup plus clair sur ce que c'est, le gaslight, parce qu'on est exactement là-dedans, dans le détournement cognitif. Qu'est-ce que ça veut dire après détournement cognitif? C'est peut-être moins clair. Il y a peut-être une explication nécessaire. Il y a peut-être de quoi qui mériterait de s'y attarder. On est vraiment dans une forme de violences psychologiques, en fait, ici, très établie d'ailleurs, qui va être utilisée sciemment par la personne pour contrôler ou assurer un certain pouvoir sur la personne avec qui elle qui fera usage de gaslighting. Il y a plusieurs formes de gaslighting, d'ailleurs, on en trouve quatre majoritairement de mémoire. Ce qu'on va amener, c'est on va amener la personne en face de nous, qu'on gaslight, à douter de sa propre réalité ou de sa propre expérience. Un exemple que j'utilise tout le temps pour l'illustrer, je pense que c'est mon préféré. Puis là, on est vraiment dans le scapegoating, qui est une des formes. Vous allez voir, il s'explique de lui-même. Un sous-thème aussi qu'on entend, mais qu'on ne sait pas trop ce que c'est. On va scapegoat, donc, mettons, ton chum t'a trompée.
Puis là, il va arriver, il va dire:« Oui, mais si tu me donnais plus de sexe, je ne t'aurais peut-être pas trompé. » Oui... vraiment? Le blâme sur la blonde. Tu es certain de ça? C'est ça, le blâme sur la copine, peut-être pas. C'est exactement ça, du scapegoating. En fait, c'est qu'on va attribuer le blâme sur une personne à qui il n'appartient pas. C'est notre responsabilité, de notre geste qu'on a posé, qu'on va ramener sur quelqu'un d'autre. C'est probablement la... oui, quand même, la stratégie de gaslight la plus fréquente: se déposséder de la responsabilité de la situation, puis l'envoyer à l'autre. Une autre chose qu'on va voir beaucoup dans le<i> gaslight,</i> on sait qu'on n'a pas raison. La personne qui gaslight, mettons que c'est moi. Je sais que je n'ai pas raison, mais je vais t'amener à croire que c'est moi qui ai raison. C'est clair. Puis jusqu'au point de douter. Tsé on va avoir eu une conversation, par exemple, sur, je ne sais pas, en dehors des violences sexuelles, la planification d'une sortie. Il avait été convenu pendant cette conversation-là que je m'occupe de réserver la chambre d'hôtel, mettons, pour la fin de semaine. On est la veille du départ, puis je ne l'ai pas faite parce que j'ai oublié de le faire. Je n'y ai pas pensé, charge mentale, c'est compliqué. Je ne l'ai pas faite. C'est tout le temps toi d'habitude qui le fais, mais tu me l'avais donné comme... Je ne l'ai pas fait. Je n'ai pas vraiment de raison, je ne l'ai juste pas fait. Et là, on prépare les trucs, puis tu veux valider qu'on a notre chambre, c'est quoi, où finalement, j'ai réservé? On s'en va où?
Puis là, je suis comme:« Non, Juliette, c'est toi qui l'avais fait la dernière fois. C'est sûr que c'était à toi de le faire.» Puis on va s'obstiner. Toi, tu te rappelles très bien autant que moi la conversation qu'on a eue. Mais je vais tellement t'amener à réfléchir autrement qu'à la fin de la conversation, souvent, ce qui arrive dans ces situations-là, c'est que la personne qui est gaslightée va finir par s'excuser puis prendre la responsabilité. On en vient vraiment à douter. À douter de ce qui est arrivé. Ça vient jouer sur notre estime personnelle, évidemment, parce qu'on commence à penser qu'on est complètement décalé tout le temps. Parce que là, si on doute de ça, est-ce que je peux tu douter tout le temps finalement de tout ce que je fais. Fait que c'est vraiment pernicieux, c'est vraiment malsain, ça a des conséquences à très long terme aussi. Ça vient jouer, comme on disait, sur l'estime de soi, sur sa capacité à s'affirmer, sur sa capacité à créer des liens avec les autres. On devient super enfermé, ça facilite aussi beaucoup l'isolement social. Si on tombe après dans plus violences conjugales, c'est un mécanisme très puissant pour assouvir justement un contrôle qui est complet sur sa partenaire, son ou sa partenaire, le gaslight. C'est utilisé pour faire des jokes, mais finalement, c'est beaucoup plus complexe. Exact. C'est beaucoup plus nocif en fait. Mais après, l'humour est une façon... Sans ce genre de remarques-là, sans l'humour, le gaslight serait encore relié aux livres et aux quelques intervenantes sociales à Viol-Secours qui en parlent avec les personnes qu'on rencontre. Exact. Mais c'est ça, des fois, au moins, le gaslight fait partie du langage commun. Quand même. Déjà ça. On avance. J'ai amené aussi le mansplaining. Le mansplaining, je l'adore. Je ne sais pas c'est quoi la version française. Puis là c'est un peu dommage parce qu'on n'a pas d'homme pour venir nous expliquer c'est quoi. C'est tellement le fun (rires). Il aurait fallu que quelqu'un, idéalement doté d'un pénis, qui s'associe à un homme, vienne nous dire qu'est-ce que c'est que le mansplaining. Il sait plus que nous. Parce qu'il sait assurément plus que nous oui. Le mansplaining en français, le premier terme qui avait été utilisé, c'est mecspliquer, M-E-C-S-P-L-I-Q-U-E-R. Mais moi, j'aime mieux, il y a deux autres options que moi, j'adore. Tu as l'air très emballée. Oui, absolument, passionnée, passionnée. Il y a le pénispliquer qui sonne magnifiquement bien. Ou phalluspliquer qui lui sonne... Il y a comme un petit peu trop de S. Il roule moins dans la bouche, mais ce n'était pas une mauvaise joke (rires). Quel cauchemar! On revient. Qu'est-ce que le pénispliquage? Donc oui, le mansplaining. Qu'est-ce que c'est? C'est un peu ça. Ça va être des situations où est-ce... En fait il y a deux catégories, disons. On peut séparer en deux catégories, tu me diras si tu es d'accord. D'un côté, on a des situations où est-ce que finalement, on a des hommes qui vont venir nous expliquer des réalités que la personne, c'est généralement des femmes, donc, connaît souvent mieux. Tsé genre ces hommes qui nous disent que non, nous urinons du vagin, nous avons juste un trou. Oui, très fort quand même. Je suis pas mal sûre que je n'urine pas du clitoris. Tsé que je n'urine pas de mon vagin. Je suis pas mal sûre que...... il y a d'autres choses. Oui, exact. Qui sont... Non, je te le dis, ton urètre et ton vagin, puis ton clitoris, toute la patente, c'est le même spot, la même affaire. De toute façon, le clitoris n'existe pas. Non, ça, c'est encore une fois... Il n'est pas trouvé. On ne sait pas où. Mais il y a des situations, je me rappelle un TikTok, justement, d'un podcasteur qui se sent très légitime de prendre la parole sur ces sujets-là, expliquait comment gérer les règles aussi en tant que femme. Comment gérer ça puis comment ça fonctionnait. Justement, lait, urètre, vagin, sang et tout ça, c'est incroyable. Il faudrait que je le retrouve, pour vrai, c'était un bijou. Pour beaucoup, ça, mais des fois aussi dans les milieux professionnels, on va le voir comme une femme qui va être à un poste avec une job spécialisée, qui est experte dans son domaine, va se faire expliquer sa job par souvent des gens qui occupent des postes moins spécialisés qu'elle dans un domaine corollaire ou pas par ailleurs. Donc, on va le voir beaucoup en milieu de travail, notamment. Ça donne lieu à quelques frustrations, évidemment, du sentiment qu'on n'est pas légitimée de parler, de nourrir un syndrome d'imposteur, souvent, pour des personnes qui se font mecspliquer ou pénispliquer tout le temps. Puis, de l'autre côté, l'autre catégorie de mansplain, on va avoir des hommes qui vont finalement toujours se sentir, on dirait, obligés de reprendre les propos tenus par ses collègues, camarades, femmes pour reformuler, pour s'assurer que tout le monde a compris. Oui, mon Dieu. Alors que généralement, il y a juste lui qui n'a pas compris. Tout le monde avait compris. Tout le monde avait compris. Ce n'était pas nécessaire, Georges, de nous réexpliquer la situation. Mais on le voit, puis ça aussi, encore une fois, milieu de travail, c'est un monde incroyable. Oui, c'est mine d'or pour ces exemples. Tout à fait. Je suis d'accord avec ces deux catégories. C'est des catégories, oui, quand même. Je pense que ça englobe l'essentiel quand même. Puis là, on en parle et vous allez le remarquer dans le quotidien, à quel point ça prend tellement de place. C'est drôle des fois, par contre. Oui, on peut en rire. Je veux dire, on a eu quand même une discussion sérieuse avec beaucoup d'affaires, mais on a ri, on a... on a tourné ça à la blague. Je pense que c'est important aussi. Tout à fait. N'hésitons pas à les<i> call-out</i> aussi, quand il se permettent ça. Pas de stress avec ça. Puis qu'il le vive son malaise, cette honte. Oui, qui lui appartient. Qu'on lui donne cette petite honte et qu'il la vive pleinement. Je te remercie beaucoup pour toutes ces explications, cette belle discussion. Ça fait plaisir. J'espère que ça va avoir aidé certaines personnes à juste démêler tout ça. Espérons. Parce que pour certaines personnes, ce n'est pas par manque, elles ne sont pas pas intéressées nécessairement, mais c'est juste beaucoup de choses à... Pas clair, puis les informations ne sont pas toujours très accessibles, disponibles ou pas plus confondantes, finalement aussi. Espérons que ça va aider un petit peu. Merci beaucoup. Merci à toi, Juliette. De notre côté, on se revoit pour un prochain épisode dans quelques semaines. Merci pour votre écoute. Bye bye.